DIALOGUE avec L’UNIVERS

samedi 18 juillet 2015

N°45- DIALOGUE avec L’UNIVERS.Chronique d’une astrophysicienne.
Sylvie Vauclair - O.Jacob/Sciences - 172 pages - 06/05/2015 - Tout lecteur.

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RÉSUMÉ : De ces quelques minutes hebdomadaires, consacrées aux auditeurs de Radio Présence (Toulouse) sur l’astrophysique, est né cet ouvrage où 52 chapitres sont destinés à conduire chacun à se poser les bonnes questions, à se remettre en cause et avoir les éléments pour y apporter une réponse.

MOTS CLÉ : Homme, univers, science, savoir, croire.

L’AUTEUR : Sylvie VAUCLAIR est astrophysicienne à l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie, professeur honoraire à l’Université P.Sabatier (Toulouse) et membre de l’Académie Nationale de l’air & de l’espace.

Nous aimerions un petit livre, facile à lire, fait de chapitres très simples accessibles à tous, et qui nous expliquerait ce que l’on devrait savoir des découvertes actuelles sur le monde et l’univers. Mission accomplie par ces 52 chroniques d’une astrophysicienne qui chaque semaine cause sur Radio Présence (Toulouse) de thèmes liés à ses compétences en astrophysique. Très motivée de placer la recherche, quel qu’en soit son horizon, au premier plan de l’aventure humaine pour s’y trouver en harmonie avec l’environnement, cette agnostique déclarée décide de s’adresser à des auditeurs catholiques, histoire de bricoler sur le savoir et le croire . Comme en musique (La nouvelle musique des sphères /2013) ce sont les imperfections ou l’inachèvement (Les esclaves/Michel Ange) de nos représentations qui sont ferments de l’évolution des idées. Mathématique et science causent aussi d’incomplétude (Godel) et d’indétermination (Heisenberg). St Exupéry (Citadelle) de nous rappeler qu’ il importe d’être limité pour devenir .

Chacun appréciera ces chroniques, l’élégance de leur brièveté qui n’est pas sans rappeler celle des merveilleux concerti de Vivaldi, et où l’auteur rend hommage à ceux qui ont fait le choix de l’unité sur le divers observé (exoplanètes, nébuleuses planétaires, vie..). A ceux qui ont modifié le centre et dire qu’il n’y a pas de centre (G.Bruno), sinon celui de notre univers observable. A ceux qui ont compris ce besoin d’arpenter espace et temps et bousculer horizons et perspectives (Aristarque). Pourquoi Terre est sphérique ? Qu’est-ce que la lumière ? De quoi l’univers est-il fait ? A quoi ça sert tout ça ? L’actualité au rendez-vous avec Rosetta et Philae (14/11/14). Avec Planck (2007) et le fond diffus cosmologique sensible aux oscillations acoustiques baryoniques créatrices des grandes structures de l’Univers. Les concepts d’inflation, de matière noire et d’énergie sombre au cœur des questionnements actuels (platitude, homogénéité, isotropie de l’univers à grande échelle) témoignent de la dynamique de nos modèles et de notre grande ignorance (95% du contenu matière-énergie à identifier). L’Anthropocène, ère géologique de l’Homme-Dieu (L.Ferry), devrait apporter des réponses. Peut-être pas celles attendues, en matière de recherche l’avenir est plus à permettre qu’à prévoir. Mais quelle chance que notre œil soit adapté à percer l’atmosphère de Terre ! Si nos yeux voyaient dans l’IR nous n’aurions aucune idée de l’infini de l’espace ? A moins que…

L’auteur nous offre en conclusion le texte d’une conférence fête au cours d’un colloque « Demain avec ou sans Dieu, croyants et incroyants s’interrogent », organisé par l’ISTR* et le GREP*. Destiné à bricoler sur certaines drôles de questions qui parasitent ce cerveau dont l’évolution a doté notre espèce (A.Pavé : Et l’Homme créa le dieux-J.Cl.Carrière : Fragilités), il est centré sur l’idée du sens de l’univers, celui de notre vie. Certains points de vue (de vie ?) clairement défendus et l’évidence que l’histoire de l’évolution des peuples et des sociétés est liée aux découvertes technologiques et scientifiques. Faut-il admettre que l’évolution de la pensée humaine et religieuse est indissociable de celle de nos représentations scientifiques du monde réel.? Mettre l’accent sur l’éducation et rendre le citoyen responsable des décisions qu’il doit prendre : bien sûr, mais en prenant la mesure des diverses manipulations imposées par nos tout aussi drôles démocraties (médias, politiques, financières…). On aurait pu aussi évoquer Einstein/Spinosa, et ce sentiment d’émerveillement religieux devant le cosmos qui constitue la plus forte et la plus noble motivation de la recherche scientifique… Laissant aux âmes faibles par peur ou par égoïsme absurde, chérir de telles pensées (ce dieu qui se préoccuperait du destin et des actes des êtres humains). La religion pourrait être une grande chose s’il n’y avait pas les croyants. (Cioran/le crépuscule des pensées).

Heureux de savoir qu’entre croyant, agnostique et athée, peut aussi se caler l’incroyant ! Faudra prévenir A.Comte-Sponville. (L’esprit de l’athéisme./2006). Conscients des limitations posées par ce besoin de définir , (la vie, une planète…), définir dieu reste le plus é-tonnant dans la mesure où en général on se refuse justement à le définir. Chacun mesure à ce jour les conséquences dés-astreuses du mono-théisme où le croyant reste bloqué sur son unique vérité, et d’in-venter l’hérésie pour sur-nager. Comment concilier (énième colloque sur ce thème accrocheur) des niveaux de compréhension si différents, sans tomber dans l’hypo-crisie ? Si les religions ne peuvent (en principe) pas faire abstraction de l’avancée des connaissances scientifiques sous peine de se discréditer, il faudra aussi avertir aussi quelques philosophes dont les références restent toujours au soleil sur quelques rivages de la Grèce, antique naturellement.

Saluons encore une fois la qualité de cet ouvrage prêt à conduire tout un chacun à se poser de (bonnes) questions, à se remettre en cause. La science n’explique pas tout, au risque de mélanger le savoir et le croire, sans nous faire oublier l’acte de foi sur lequel elle bricole : l’univers est accessible au cerveau de notre espèce raisonnable (1011 neurones sollicités, autant que d’étoiles dans la Galaxie, et quelques 104 connexions chacun, à gérer des informations environnantes). Et que c’est pour des motifs irrationnels que nous rationalisons de la sorte…

*ISTR=Institut de Science & Théologie des Religions
*GREP= Groupement de Recherche pour l’Educations et la Prospective.

Jacques CAZENOVE - 14/07/15

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